Le Béarn défend sa souveraineté
La bastide de Navarrenx face au Royaume de France...
Explorez les différents aspects de cette période
En 1566, Jeanne d’Albret établit un règlement destiné à organiser la Réforme en Béarn. Désormais, un synode unique devait se tenir chaque année au mois de novembre ; les procès de mariage relevaient exclusivement de la reine et de son Conseil ; fornifications, concubinages, paillardise, femmes publiques, mendicité des valides, étaient sévèrement réprimées (jusqu'au bannissement). Elle interdit les cartes et les dés, confirma les restrictions sur les danses, bannit moines et prêtres de toute quête, et supprima les processions publiques catholiques, n’autorisant plus que des cérémonies à l’intérieur des cloîtres. La jeunesse devait être instruite au collège d’Orthez, financé par le trésor public, avec un procureur et deux régents nommés pour assurer son fonctionnement. Les ministres protestants reçurent un traitement annuel, 300 livres pour les mariés, 240 pour les célibataires, mais il leur fut interdit de prêcher hors du Béarn sans autorisation, tandis qu’à l’intérieur du territoire, ils jouissaient d’une pleine liberté de prédication, contrairement aux catholiques à qui ce droit fut retiré. Les enterrements furent désormais interdits dans les temples, sauf exception, et devaient se dérouler sans cérémonie. Les prêtres catholiques ne pouvaient plus sonner les cloches ni retourner dans les lieux où leur culte avait été supprimé. Jeanne déclara vouloir extirper l’« idolâtrie romaine » et supprima les bénéfices ecclésiastiques, dont les revenus furent attribués aux pauvres de l’Église réformée. Les patrons laïques conservaient seulement le droit de présentation, à condition que les bénéficiaires ne fussent pas catholiques. Enfin, tout obstacle posé par les évêques et abbés fut interdit, confirmant la mainmise de Jeanne sur la Réforme béarnaise. Cette radicalisation s’explique par plusieurs facteurs : la condamnation de Jeanne d’Albret par l’Inquisition, les affrontements religieux dans le Sud-Ouest qui l’obligèrent à inspecter et fortifier ses places, ainsi que son refus de céder au roi de France sur la réévaluation de la monnaie béarnaise, les « bacquettes », symbole de son autorité régalienne. Sa politique suscita de fortes résistances : plusieurs gentilshommes catholiques complotèrent contre elle, comme Jean de Belsunce, qui fomenta un soulèvement en Basse-Navarre, ou Jacques de Sainte-Colomme, qui projeta l’enlèvement de Jeanne et de son fils Henri, l’interdiction du calvinisme et le bannissement des étrangers protestants. Même les États de Béarn, dirigés par les évêques catholiques, contestèrent les ordonnances de 1566. Jeanne les imposa néanmoins avec fermeté, tout en maintenant le catholicisme dans les villages où il demeurait majoritaire.